Meghan Jarry : de l’expo agricole à la vie d’agricultrice
Les visages de la relève syndicale

Meghan Jarry
Implication |
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Présidente du Syndicat de la relève agricole de l’Abitibi-Témiscamingue depuis 2019 |
Administratrice représentante de la relève à la Fédération de l’UPA d’Abitibi-Témiscamingue (2019, 2020 et 2023) |
Représentante de l’Abitibi-Témiscamingue au CA de la FRAQ et membre du conseil exécutif de la FRAQ au niveau provincial depuis 2022 |
Petite, Meghan Jarry adorait les sorties familiales à la foire agricole. C’est là, entre les proprettes vaches d’exposition, les manèges colorés et les kiosques de kermesse, que Meghan a eu la piqûre pour l’agriculture.
Quand est venu le temps de choisir un champ d’études, Meghan n’avait pas oublié le bonheur des heures passées à contempler les vaches. « À la fin de mon secondaire, les cégeps présentaient leurs programmes. Il fallait en choisir quelques-uns. J’étais allée à la présentation de technique vétérinaire parce que ce qui m’intéressait, c’était les animaux, et j’avais choisi un autre truc où il y avait des vaches, sans trop savoir ce que c’était. Après la présentation de l’ITA [Institut de technologie agroalimentaire], le jour même, j’ai choisi de m’inscrire en Gestion et exploitation d’entreprise agricole, en production laitière! » En rigolant, Meghan admet qu’elle n’avait « pas trop rapport là ».
« La plupart des étudiants étaient des enfants d’agriculteurs qui planifiaient prendre la relève de la ferme familiale. J’ai rushé à trouver des données pour faire mes travaux, parce que tout le monde ou presque travaillait avec ses propres chiffres », se souvient-elle sans acrimonie.
Malgré ces petites embûches, elle confie avoir adoré son passage au cégep qui l’a ramenée sur… le plancher des vaches. « J’avais cette image rose et bucolique de l’agriculture. Mon seul contact avec ce monde-là avait été les expos agricoles et quand on s’arrêtait sur le bord de la route pour regarder les vaches dans les champs! Pas très réaliste, mettons… », s’esclaffe Meghan.
Elle admet être tombée en bas de sa chaise. « Même si ce n’était pas du tout ce que j’imaginais, je suis tombée en amour avec le domaine agricole. » Et, accessoirement, avec un agriculteur de Palmarolle, en Abitibi.
« J’ai rencontré mon conjoint à l’ITA, mais on a commencé à se fréquenter quand j’étais à l’Université Laval en agronomie. À l’ITA, j’ai découvert que ce que j’aimais le plus, c’était les champs, les grandes cultures et les cultures fourragères. Alors, je me suis spécialisée en production végétale. »
Durant ses études, elle fait maints allers-retours entre Québec et l’Abitibi, s’y fait des amis petit à petit. Puis, en 2017, elle tombe enceinte de son premier enfant et prend définitivement le chemin du nord. « C’était clair que j’allais rejoindre mon chum! J’ai
grandi à Boucherville, mais assez tôt dans ma vie, j’ai su que je ne voudrais pas vivre là… »
Meghan et son conjoint Fabien sont d’ailleurs propriétaires uniques de l’entreprise familiale, la Ferme Beaudoin Bégin inc., depuis 2020. Le père et la soeur de Fabien y travaillent avec eux.
Avec 110 kg de quota produit par les quelque 60 vaches en lactation, l’entreprise est la fierté des propriétaires!
Dire oui à l’implication
Malgré trois grossesses en peu de temps (ses trois enfants ont aujourd’hui moins de 6 ans), Meghan a quand même trouvé le temps de s’impliquer à l’UPA.
« Au début, j’ai commencé parce qu’on m’a dit “viens-t’en” à maintes reprises, et à force de me le faire dire, j’ai décidé d’y aller. Mon beau-père était très impliqué, il m’amenait partout. Finalement, j’y ai rencontré plein de gens et c’était vraiment l’fun! », lance Meghan avec un sourire.
Son implication lui a aussi donné l’occasion de se faire un nom. « Quand je suis arrivée en Abitibi, j’étais toujours présentée comme “la blonde à Fabien” ou “la bru à Pierre”. C’est comme si je n’avais pas de nom! Je voulais qu’on me connaisse pour qui j’étais
dans la région », dit-elle en rigolant.
Mais au-delà de cette identité propre qu’elle est parvenue à développer grâce à ses engagements, c’est du travail qu’elle accomplit au sein des différentes instances dont elle est le plus fière. « On est vraiment une belle gang. En Abitibi-Témiscamingue, il y a des
gens extraordinaires qui ont à coeur leur région et la défense de l’agriculture. On n’est pas gênés de parler et c’est vrai qu’on est parfois considérés comme des petits chialeux, mais c’est parce qu’on tient à notre agriculture. On tient au maintien de sa vitalité, partout au Québec, et on travaille dans cette direction-là, peu importe la production! »
Meghan ne fait pas les choses à moitié. Elle est présidente du Syndicat de la relève agricole de l’Abitibi-Témiscamingue depuis 2019 et elle représente la région au conseil d’administration (CA) de la Fédération de la relève agricole (FRAQ) en plus de siéger au conseil exécutif de la FRAQ au niveau provincial. Mais elle est d’abord et avant tout la maman de Florence, Nathan et Mavrik. L’aînée est autiste non verbale, ce qui n’est pas un frein à l’implication de sa mère. « C’est un cadeau du ciel, Florence! Et je suis heureuse qu’elle puisse grandir à la campagne, là où elle a tout l’espace de liberté dont elle a besoin », lance-t-elle.
Ce statut de parent qui la définit, elle tient à ce qu’il soit reconnu par les différentes instances où elle s’implique. « Si on veut attirer des femmes et des jeunes dans nos syndicats, il faut être conscient qu’il va y avoir des enfants! Dans le domaine agricole, les enfants grandissent à la ferme et c’est normal que nos implications sociales soient représentatives de nos vies. Les mentalités évoluent. J’ai toujours amené mes enfants avec moi et je ne me suis jamais sentie non accueillie. »
Elle déplore la faible représentation de la relève dans certains CA. « Ça ne veut pas dire d’imposer des quotas ou la parité, parce qu’on veut d’abord des gens qui veulent être là et qui veulent apporter quelque chose. Moi, je m’implique parce que j’aime ça, mais je comprends que tout le monde n’est pas à la même place. »
L’implication, bien qu’exigeante, lui apporte beaucoup. « Ça me sort de ma routine et ça me donne tellement en termes de rencontres, de connaissances, ne serait-ce que pour l’information sur les programmes disponibles. J’aime ça quand je rencontre des gens qui ont des questions et que je peux y répondre ou quand je peux les aider en les redirigeant. Ce partage est précieux! »
L’accès aux terres est un de ses chevaux de bataille. « Ici, on vit vraiment la dévitalisation des campagnes. Oui, des fermes se créent, et on a même un bilan positif depuis deux ans, mais on en a perdu beaucoup. Il reste moins de 100 fermes laitières dans notre région; c’est très peu. Les prix des terres augmentent partout! Il faut qu’on puisse rester propriétaires de nos terres et que ceux qui veulent se lancer soient capables de le faire. Si on veut de la relève, des entreprises transférables, l’accès aux terres est le nerf de la guerre. Et ça concerne toutes les productions. Les terres, c’est notre terroir, notre territoire. Notre matière première pour nourrir le Québec! »
Ferme Beaudoin Bégin inc.
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Les visages de la relève syndicale
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