L’Union des producteurs agricoles participera bientôt aux travaux du Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes, qui se penche actuellement sur la révision de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) en 2026.
Nous aborderons bien entendu les enjeux laitiers, le président américain Donald Trump ne cachant pas ses ambitions à l’endroit du marché canadien. Il a d’ailleurs confirmé que ce volet était encore prioritaire lors de sa récente rencontre à la Maison-Blanche avec le premier ministre canadien, Mark Carney.
Nous soulignerons aussi que l’échéance 2026 n’est pas uniquement une préoccupation pour le secteur du lait. D’autres productions sont inquiètes, comme le démontrent certains témoignages d’acériculteurs et d’acéricultrices en marge de la Journée nationale de l’érable, le 19 octobre dernier.
Rappelons que la majeure partie des exportations bioalimentaires québécoises (72 % en 2024), incluant les produits d’érable (62 % en 2024), est destinée aux États-Unis. La quasi-totalité de ces exportations échappe aux tarifs américains de 35 % en raison de leur conformité à l’ACEUM. La situation pourrait toutefois changer rapidement en raison de la révision de 2026 et de la volatilité du président américain (à ce moment ou d’ici là).
Par ailleurs, les tarifs américains (dits « réciproques ») imposés à environ 185 pays, même s’ils ne ciblent pas le Canada, ont tout de même des répercussions chez nous. Afin d’éviter ces tarifs, des fournisseurs de partout dans le monde cherchent actuellement d’autres destinations que les États-Unis pour écouler leurs produits (en l’occurrence agricoles). Le marché canadien est une option alléchante pour plusieurs d’entre eux.
Cette dynamique accentue de beaucoup les risques de dumping ou de compétition déloyale, faute de réciprocité des normes et en raison du soutien massif que plusieurs pays accordent à leur secteur agricole. Certains d’entre eux « masquent » cet appui en multipliant l’aide environnementale, un soutien permis par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) – contrairement aux subventions directes, réputées avoir des effets de distorsion sur la production et les échanges commerciaux.
C’est pourquoi la loi américaine sur l’inflation de 2022 (Inflation Reduction Act) prévoyait 38 G$ (US) d’ici 2031, entièrement sous la forme de soutien environnemental, même si l’objectif véritable était de passer à travers la crise, et non de verdir quoi que ce soit. L’Union européenne suit également cette tendance, notamment par le biais de la Politique agricole commune.
Le gouvernement canadien invoque périodiquement les règles de l’OMC pour justifier ses décisions en matière de soutien agricole (on peut faire ceci, on ne peut pas faire cela, etc.). Ce dernier a l’épiderme beaucoup plus sensible qu’ailleurs dans le monde, et cette tendance à laver plus blanc que blanc va à l’encontre de ses intérêts (et de ceux de son secteur agricole).
Comme plusieurs conférenciers et panélistes l’ont mentionné lors du Grand Colloque de la mise en marché collective, tous les pays défendent leurs marchés les plus sensibles (sucre et coton aux États-Unis, riz au Japon, etc.) et privilégient divers modèles en matière de régulation des marchés agricoles. Les gouvernements canadien et québécois doivent rester fidèles à leurs principes, continuer d’investir en agriculture pour assurer l’autonomie et la sécurité alimentaire du pays et défendre leurs choix, qu’il s’agisse de l’ACEUM ou de toute autre négociation commerciale.